Dernière ligne droite pour le procès du groupe néonazi NSU en Allemagne | PROGRAMME | DW | 09.05.2018
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Dernière ligne droite pour le procès du groupe néonazi NSU en Allemagne

En 2012, Angela Merkel promettait la justice aux victimes de la pire série de meurtres xénophobes en Allemagne. Cinq ans après le début du procès, de nombreuses questions ne seront jamais élucidées. // À l'occasion des commémorations de l'abolition de l'esclavage en France, une lecture-concert inspirée du roman "Moi, Tituba sorcière... noire de Salem" de Maryse Condé est donnée à Paris.

"En tant que chancelière de la République fédérale, je vous promets que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour résoudre les meurtres, débusquer les complices et les donneurs d'ordre et traduire tous les auteurs en justice. Toutes les autorités, fédérales et régionales, y travaillent d'arrache-pied."

Le 23 février 2012, l'Allemagne rend un hommage national aux victimes de la NSU. Un hommage tardif : cela  fait quelques mois, seulement, que le pays a découvert, choqué, l'existence de la cellule terroriste "Clandestinité nationale-socialiste", mais les crimes du commando néonazi remontent à bien plus loin.

La cérémonie d'hommage aux victimes de la NSU, le 23 février 2012

La cérémonie d'hommage aux victimes de la NSU, le 23 février 2012

Entre 2000 et 2007, ses membres ont assassiné méthodiquement dix personnes, dont neuf d'origine immigrée (photo). Ils ont aussi commis trois attentats, dont celui de la Keupstraße, dans le quartier turc de Cologne, en 2004, et une quinzaine de vols à main armée à travers toute l'Allemagne.

C'est ce que la police a fini par découvrir, après avoir enquêté pendant des années sur de fausses pistes.

Les deux tueurs, Uwe Bönhardt et Uwe Mundlos, ont été retrouvés morts en novembre 2011 dans leur caravane incendiée, après avoir revendiqué tardivement leurs actes. La seule survivante du groupe, Beate Zschäpe, a été arrêtée dans la foulée puis traduite devant la justice avec quatre co-accusés, qui n'ont toutefois qu'un rôle mineur dans l'affaire.

Depuis l'ouverture de son procès à Munich, le 6 mai 2013, sa ligne de défense n'a pas bougé : elle plaide l'innocence.  

La défense réclame l'acquittement, le parquet la peine maximale

L'accusée principale du procès de la NSU entre dans la salle du tribunal de Munich, escortée de policiers, sous le crépitements de flashs... la routine pour Beate Zschäpe après plus de 400 jours d'audience. Alors que son procès entre dans sa sixième année, elle apparaît détendue et confiante. L'heure est venue pour ses avocats de plaider l'acquittement de leur cliente. 

Beate Zschäpe, la routine des audiences à Munich

Beate Zschäpe, la routine des audiences à Munich

Le parquet fédéral, lui, a requis la peine la plus dure: la prison à perpétuité assortie de circonstances aggravantes. Lors du réquisitoire en septembre 2017, le procureur a qualifié Beate Zschäpe de personne "froide et calculatrice" - une impression confirmée par de nombreux témoignages durant le procès. Pour le parquet, il n'est donc pas question de laisser Beate Zschäpe sortir après 15 ans de prison. L'État doit cette justice aux victimes de la cellule néonazie. 

Cinq ans de procès n'ont pas permis aux familles endeuillées d'obtenir les réponses à leurs nombreuses questions. L'ancien député conservateur Clemens Binninger a dirigé la dernière des commissions parlementaires mandatées par le Bundestag pour faire la lumière sur les défaillances des autorités dans le dossier de la NSU entre 2015 et 2017. Il reste, selon lui, de nombreux points à éclaircir:

"La NSU n'a-t-elle vraiment été qu'un trio et les deux hommes ont-ils été les seuls à commettre ces crimes au sein du groupe sans jamais laisser de traces? C'est l'une des grandes questions sans réponse. La deuxième, directement liée, est celle de savoir s'il y avait des complices sur les lieux. Et on se demande alors aussi qui a donné l'impulsion décisive sur le choix des lieux et des victimes. C'est une question qui préoccupe encore beaucoup les proches des victimes."

La police a privilégié d'autres pistes que celle de crimes xénophobes

Des proches qui ont souvent d'abord été traités comme des suspects. Ceux d'Enver Simsek, première victime du commando néonazi, sont ainsi interrogés sans ménagement après l'assassinat du fleuriste en 2000 à Nuremberg.

Une affiche en mémore d'Enver Simsek, la première victime du commando néonazi

Une affiche en mémore d'Enver Simsek, la première victime du commando néonazi

La police ira jusqu'à accuser son épouse et son beau-frère de s'être débarrassés de lui, une histoire racontée dans un livre des années plus tard par Semiya Simsek, la fille d'Enver Simsek. 

Antonia von der Behrens est l'avocate du fils d'une autre victime de la NSU, Mehmet Kubaşik. Un commerçant d'origine turque assassiné en 2006 à Dortmund. Elle affirme que la police a systématiquement ignoré la thèse extrémiste pour privilégier celle des règlements de compte intracommunautaires ou des crimes de droit commun. Des fausses pistes qui ont permis à la NSU d'agir pendant toutes ces années en toute impunité.

"Le fait que les enquêtes aient été principalement menées à charge contre les victimes avant que la NSU ne se dévoile elle-même, on ne peut qu'appeler cela du 'racisme structurel', dans le sens où les enquêteurs avaient tous la même image: si une personne originaire de Turquie est tuée ici, c'est forcément la mafia turque, ou une histoire de drogue ou de criminalité organisée... peu importe. On a vu cela à chaque affaire, jamais il n'a été envisagé qu'il puisse s'agir d'un acte commis par des néonazis."

L'Office chargé de surveiller les groupes néonazis n'aurait rien vu

Le rôle trouble de l'Office de protection de la Constitution, chargé de surveiller la mouvance néonazie, a été dénoncé par les commissions d'enquête parlementaires successives et au cours du procès.

Le rôle des agents infiltrés a été critiqué mais leur responsabilité n'a pas été établie avec certitude

Le rôle des agents infiltrés a été critiqué mais leur responsabilité n'a pas été établie avec certitude

Sans toutefois établir de liens avérés entre les agents de l'administration et le groupuscule néonazi. Pour Antonia von Behrens, la version officielle selon laquelle les autorités n'étaient pas au courant, ne tient pas debout:

"De nombreuses informations étaient connues très tôt. Pourquoi les autorités ne les ont-elles pas communiquées à la police et pourquoi la police n'a-t-elle pas mieux utilisé le peu d'informations dont elle disposait, nous ne pouvons pas répondre à cela. Il ne serait pas sérieux de spéculer là-dessus parce que nous n'avons pas pu l'établir jusqu'à aujourd'hui."

Selon l'avocate, il n'y a pas eu de volonté politique d'explorer la responsabilité de l'Etat dans l'affaire de la NSU. La promesse d'Angela Merkel selon laquelle toute la lumière serait faite sur les crimes du groupe néonazi ne sera probablement jamais honorée.

Le verdict du procès de la NSU est attendu d'ici l'été.

 

"Tituba" ou le parcours d'une femme noire vers la liberté

Danielle Gabou interprète tous les personnages du roman de Maryse Condé, accompagnée au piano par Lise Diou

Danielle Gabou interprète tous les personnages du roman de Maryse Condé, accompagnée au piano par Lise Diou

La France commémore, chaque 10 mai, l’abolition de l’esclavage. Une "journée nationale des mémoires de la traite, de l'esclavage et de leur abolition" qui a mis du temps à s'imposer : elle a été fixée cinq ans après l'adoption de la loi Taubira. La loi, adoptée par le parlement le 10 mai 2001, reconnaît la traite et l'esclavage en tant que crimes contre l'humanité.  

C’est sur proposition de l’écrivain Maryse Condé, présidente du Comité pour la mémoire de l’esclavage, que l'ancien président Jacques Chirac a fixé cette date en 2006. 

Cette année, le président Macron a annoncé la création d’une Fondation pour la mémoire de l’esclavage, qui sera présidée par l’ancien maire de Nantes et ancien Premier ministre, Jean-Marc Ayrault. 

À cette occasion, notre correspondante à Paris, Mélissa Chemam, a rencontré la Compagnie Sans sommeil, qui a monté un spectacle adaptant le roman  "Moi, Tituba sorcière... noire de Salem" de Maryse Condé, parrainé par la politologue de renom Françoise Vergès et l’ancienne ministre Christiane Taubira.

Le spectacle "Moi, Tituba sorcière... noire de Salem" de la compagnie Sommeil, en partenariat avec le projet "La Route de l’esclave : Résistance, Liberté et Héritage" et la Coalition internationale des artistes pour l’Histoire générale de l’Afrique de l’UNESCO.  

Rendez-vous le 23 mai - de 19h à 22h  à la Maison de l’UNESCO Salle I, 7 place de Fontenoy, Paris 7ème. Ce sera en présence de l’auteur. 

Retrouvez tous les numéros du magazine Vu d'Allemagne dans la médiathèque, à écouter et à télécharger.

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